26 mai 2008

Pantalons

Alain Rémond est une espèce en voie de disparition. C'est ce que l'on apprend cette semaine dans « Marianne ». Pourquoi? Me diront les lecteurs curieux; An bon? Feront les lecteurs incrédules et Quand est-ce-qu'on mange? s'interrogeront les lecteurs gourmands. Je ne répondrai si vous le voulez bien qu'à la première de ces questions: Alain Rémond mesure 1,72m, ce qui est tout à fait honorable, car comme le dit Corneille dans « Le Cid chez les Ch'tis », je cite de mémoire: « aux âmes bien nées, sur la valeur n'influe pas la longueur des pieds ». Donc, Alain Rémond est un moyen Grand Homme, qui met du W33-L30 en ce qui concerne la longueur de ses pantalons (car si l'élégance et la distinction sont naturelles chez Alain Rémond, mettre des pantalons ça fait quand même plus classe).


Il fait du W33-L30 pour 1,77m? J'aurais dit un petit W-33-L32, moi!me diront les lecteurs tailleurs-couturiers (car je sens bien que des lecteurs tailleurs-couturiers me lisent par milliers. J'aime beaucoup les tailleurs. D'ailleurs, quand j'étais petit, mon père était tailleur, mais ma mère, elle était là, c'est le principal). Mais où veux-je donc en venir? Voulais-je simplement vous communiquer les mensurations épatantes d'Alain Rémond comme ça, pour le plaisir, pour que la France entière sache que son tour de taille est digne d'un athlète filiforme? Non, c'est uniquement une donnée d'un vaste problème: pour faire court, Alain Rémond ne trouve plus de pantalons à sa taille car lui dit-on «les gens portant du L-30 sont de moins en moins nombreux, d'où une baisse de rentabilité à fabriquer des pantalons de cette taille et une tendance à la disparition du L-30 », et d'où aussi son cri du coeur déchirant: « Je suis une espèce en voie de disparition ». Oui, je sais, mes amis, les déboires d'Alain Rémond, c'est triste, comme le cyclone birman et le séisme chinois, mais moins quand même, parce que je n'ai jamais vu un paysan birman ou un écolier chinois un tant soit peu fichu d'écrire une chronique sur les cintres, alors, bon, tout de même.


De ce fait, je pourrais aussitôt entamer, sur ce sujet brûlant: la disparition des L-30, l'éternel couplet trostkisto-besancenotiste: « oui c'est honteux, rentabilité à tous prix, les grands patrons s'engraissent sur le dos des petites gens, profit faramineux, cadeaux fiscaux, paquet fiscal, taxer les stocks-options.... » je préférerais plutôt m'interroger sur les raisons profondes cette situation, à savoir que la France grandit. De plus en plus. Très vite. Les grands nous envahissent. Moi par exemple, je suis quand même très grand. Très très grand. Enfin juste assez grand pour me prendre la tête dans le lustre du salon, nom de dieu nom de dieu.


Quant à Alain Rémond, si je puis me permettre, je n'ai qu'un seul conseil à lui donner: se faire prêter des pantalons par Nicolas Sarkozy. Je ne vois que ça.


A la semaine prochaine.


19 mai 2008

Cannes

« -Bonjour, bienvenue amis téléspectateurs dans notre émission, exceptionnellement en direct de de la plage du Martinez de Cannes, enfin presque puisque nous vous accueillons dans l'hôtel Formule 1 de Mandelieu-la-Napoule! (applaudissements du public)Ce soir encore, à l'occasion bien sûr du Festival de Cannes, on aura du beau monde pour parler cinéma avec notamment Olaf Peklowski, réalisateur du magnifique « Minuit moins 5 » documentaire slovaque sur les conditions d'arrachage des dents de sagesse en Europe de l'Est et dont on parle pour la Palme d'Or, James Sherwood et Mike Dubsky, respectivement acteur principal et réalisateurs américains du très attendu dernier volet des « Aventures des Aventuriers Aventureux, épisode 6 »qui sera présenté demain hors-compétition, lesquels toucheront leur oreillette pour signaler des problèmes techniques et prononceront la traditionnel phrase de tous les acteurs étrangers en visite chez nous: « Yes, I like a lot France, Paris, Tour Eiffel, baguette, I love.... », et puis, Jeanne Chalon, jeune et jolie espoir du cinéma français, qui est à l'affiche de « Parle-moi d'amour à Deauville puisque je t'aime un peu pour le meilleur et le pire » une comédie avec Pierre Arditi et Audrey Tautou, un autre réalisateur, vieux et très apprécié de Télérama qui présente ici son dernier film d'auteur ennuyeux et très bien mais dont j'ai malheureusement oublié le nom, Jacques Villemeny pour son dessin animé magnifique « Ivan, l'enfant-sauterelle, contre la Sorcière des Ténèbres » accompagné d' Alain Chabat qui double le héros, Arthur, l'homme-ragondin musqué d'Amazonie occidentale, l'humoriste Gad Elmaleh, qu'on fera tous semblant de ne pas reconnaître puisqu'il vient déguiser lourdement pour une imitation à mourir de rire d'un restaurateur chypriote du XVIIIeme de sa connaissance, Jennifer Hushley pour l'adaptation cinéma de la série culte « Chérie, j'ai envie d'avoir des poissons rouges », Stéphane Bern qui nous dira que le festival, c'était quand même mieux avant, un jeune chanteur issu de la télé-réalité qui bougera les lèvres sur le play bac de sont tub « Truc de ouf », un DJ et sa femme, un membre du jury que nous allons harceler en toute impudeur pour savoir quelles sont ses impressions sur les films déjà projetés, un écrivain-philosophe fêtard qui nous dira qui il a vu au bar du « Jimmiz », un duo de comiques que nous nous efforcerons de trouver drôle, un critique cinéma snob de la presse écrite, un acteur favori pour la palme d'or mais qui ne l'aura pas à la surprise générale, Franck Rihcard l'agitateur polémique qui choquera nos consciences en direct sur le plateau, Michèle Mercier, qui joue une cliente de La Poste dans « Bienvenue chez les Chtis » et qui nous dira quelles ont été ses impressions de tournage, et puis un écrivain auteur d'un livre sur Mai 68 puisqu'il faut bien en parler. Ha! Cannes éternelle magie du cinéma! »

12 mai 2008

Gallo

« Horniy, j'an soe horniy dou cou-la !
-
Qhi qé n-i a corr, don ??!??”
- “ Avizz ! n’an vennla corr unn vnaeü a pâssae, pa” E yèll-si qé d’anségnae o son daï unn vouèliéy de gouéziaù qi taen a s'antt-pourgalae olmon la rabinn. »


Vous n'avez sans doute rien compris à ce dialogue (Fabien Lécuyer, in La souaètt dou bouaé-jouaerr) . Rassurez vous. C'est normal. Vous venez de lire de la littérature écrite en gallo, la langue des Bretons, notre sujet du jour. Or, pour déchiffrer le gallo, il faut être capable, si l'on ne fait pas partie des quelques initiés, de démêler un sombre et complexe écheveau syntaxique et langagier, tâche dans laquelle même de brillants esprits comme Pierre et Marie Curie n'auraient probablement pas réussi. Ainsi, comment donc retrouver l'écheveau au gallo, dans les Curie (1), sans en faire tout un foin? C'est mes chers amis toute la question.


Le gallo, comme je le disais, est la langue parlée en Basse-Bretagne, en Haute-Bretagne, ou même en Moyenne-Bretagne, en Bretagne-du-Milieu sans parler de la Bretagne-en-haut-un-peu-vers-la-gauche ou de la Bretagne-deuxième-porte-à-droite, et enfin, dans un bureau de « Marianne », par Alain Rémond car, en effet, le chroniqueur parle le gallo, il l'écrit même, la semaine dernière, dans sa rubrique, par exemple, ce qui a suscité un nombre tout a fait impressionnant de réactions de lecteurs indignés et éffarouchés par la qualification de « patois » qu' Alain Rémond a employé pour définir le gallo., si j'ai envie de faire une phrase encore plus longue.


Donc, le gallo n'est pas un patois, mais une langue, une vraie, reconnue par l'Union Européenne, et tout et tout. Alain Rémond le saura et a d'ailleurs rectifié sa petite erreur (vous avez bien lu: Alain Rémond et « erreur » sont dans la même phrase, incroyable mais vrai) dans sa chronique de cette semaine. Personnellement, (lecteurs impatients, c'est le passage où je donne mon avis) je n'ai rien contre les patois. Cette façon qu'ont les paysans analphabètes voir communistes d'outre-périphériques de converser en braillant des mots affreux m'est très sympathique. D'ailleurs, je parle moi-même quelques dialectes provinciaux. Oui, tout à fait, je connais par exemple parfaitement le patois du Gard, le fameux patois nîmois .(2)


Pour finir, je dois dire que pour ma part, j'attends impatiemment un « Bienvenue chez les Gallos », déclinaison bretonne du succès de Dany Boon, avec Alain Rémond dans le rôle titre. Ca serait bien. Rêvons un peu...


A la semaine prochaine.



(1)Ce brillant jeu de mot a été déposé au titre de la Loi su la Propriété Intellectuelle, article B-687, alinée E52, chez Maître Lefranc, du cabinet « Lefranc, Lefranc et Dupré », Paris VIIIeme.

(2)Ce jeu de mots ci est d'un ami nîmois que je tiens à remercier particulièrement non pas pour tenter piteusement de masquer le vide effarant de cette chronique, mais parce que c'est vraiment sincère.

05 mai 2008

Critique

Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais Alain Rémond sort un nouveau livre. Ca s'appelle « Le cintre était sur la banquette arrière », une petite anthologie de ses billets hebdomaires de « Marianne ». Alain Rémond a une chance extraordinaire: il n'a même pas besoin d'écrire ses livres. Il n'a qu'à rouvrir ses tiroirs qui grincent, exhumer ses dossiers poussiéreux, chercher dans ses placards fatigués, pas dans sa penderie, cintres obligent, et en extirper quelques une de ses hilarantes chroniques qu'il envoie fissa à son éditeur-bien-aimé-l'augmentation-faudrait-y-penser.


Le nouveau livre d'Alain Rémond, je dirais mieux, « le nouveau Rémond », comme on dit « le nouveau Nothomb », « le nouveau Houellebecq », « le nouveau Sarkozy », etc... est donc un recueil de chroniques parues dans " Marianne ", vendu à un prix dont la modicité vous fera sourire. Je précise que je ne l'ai pas lu, vous non plus, car on ne pourra l'acheter que le 30 Mai, jour qui, hasard heureux, se trouve exactement à quatre mois trois semaines et deux jours de l'anniversaire de mon grand-oncle, il y a de ces coïncidences, quand même, et qu'est ce que je sers à Madame Bouchard, le bonjour de ma part à Bouchard, ah ça, m'dame, y a plus de saison, on vit une drôle d'époque, une hirondelle fait pas le printemps, comme je dis toujours petit à petit l'oiseau fait son nid, laissez donc, ça tombera pas plus bas.


Ce livre, je ne l'ai pas lu, mais monsieur Antoine Perraud, si. Monsieur Antoine Perraud est journaliste. Sa passion dévorante pour la littérature et un besoin irrésistible de faire son intéressant le pousse, comme beaucoup, à commettre régulièrement quelques réflexions sur le monde des livres, dans son blog de Mediapart, le site participatif mais payant, faut pas déconner.


Or, Monsieur Perraud, je le bouscule un peu mais c'est sûrement quelqu'un très bien, n'a pas trop aimé le livre d'Alain Rémond. Enfin, pour être rigoureux comme Jean-Pierre Elkabach, je dirais que c'est plus nuancé. C'est à dire que dans l'ensemble, le livre lui a plutôt plu, mais en fait, il trouve que ça fait immédiatement plus branché si il adopte pour en parler cette distance condescendante de critique littéraire à qui on ne la fait pas, cette ironie de salon qui jauge en pouffant le travail des autres, en trouvant deux bons mots méchants qu'on pourra répéter au « Masque et la Plume ».


Mais, je suis peut-être injuste car Monsieur Perraud, entre deux digressions hasardeuses, ne parle pas tant du livre que de l'auteur. Un auteur qu'il épingle une ou deux fois de façon lourdingue, à l'aide de sa plume émoussée et de citations hors-contexte, puis, Fouquier-Tinville repenti, se ressaisit heureusement aussitôt, et attendri, complimente emphatiquement l'écrivain en usant de métaphores quasi-homèriques, deux points ouvrez les guillemets attention, c'est beau comme du Hervé Villard: « Comme un personnage de Jacques Tati transplanté dans un spot publicitaire, tel un enfant né juste avant l’élection de Vincent Auriol qui se retrouve juste après celle de Nicolas Sarkozy, Alain Rémond, Peter Sellers de la chronique qui aurait lu Barthes (NDLR: Monsieur Perraud parle visiblement de Roland, pas de Fabien), continuera de mordre la vie à belles dents tant qu’il y aura un contrôleur, dans un tortillard à l’approche d’Auray, pour nous gratifier, par voie de haut-parleur, du message suivant : « Avant de descendre du train, veuillez vous assurer de la présence effective du quai. »


Conclusion chers lecteurs, amis fidèles et nouveaux venus, toujours les bienvenus: je n'en ai pas. De conclusion, j'entends, très bien même, merci les sonotones Robert Hossein. Tout juste vous recommanderai-je, si le courage de mes convictions m'y poussait, de lire le dernier Alain Rémond, pour vous faire une idée. Mais ça serait sûrement une basse incitation commerciale.


A la semaine prochaine, ou plutôt, A lundi si le coeur vous en dit (je tente le superbanco).